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Néologisme issu de la contraction entre les mots physique et digital, le phygital désigne l’ensemble des produits combinant des aspects à la fois ancrés dans le réel et le numérique. Issu du secteur commercial, ce terme a été inventé en 2013 par l’agence australienne Momentum pour qualifier une série de pratiques marketing novatrices. Régler un achat sur son smartphone, consulter sur une borne interactive disponible en magasin le catalogue produit d’une enseigne, essayer des habits en réalité augmentée depuis chez soi, recourir au click and collect, etc. Toutes ces actions aujourd’hui parfaitement intégrées à notre quotidien associent la dimension physique du produit commercialisé à la digitalisation de son processus de vente. Toutefois, le e-commerce est loin d’être le seul secteur à faire appel au concept du phygital. A l’ère de l’apprentissage numérique, de nombreux jeux intelligents se développent pour favoriser l’acquisition de nouvelles connaissances et compétences de façon ludique, notamment dans le contexte de la formation expérientielle. Mais alors, quels sont les avantages et les modes d’applications du jeu phygital dans l’apprentissage ?

Jeu phygital et phygital learning

Un jeu phygital propose donc d’évoluer dans un univers combinant des éléments réels et numériques, une hybridation particulièrement mobilisée au sein de l’industrie du jeu vidéo. En effet, certains opus s’accompagnent d’objets tels que des figurines connectées ou des cartes permettant de générer de la réalité augmentée afin d’enrichir l’expérience du joueur ou pour débloquer un contenu inédit. Dans le contexte des jeux intelligents et de la formation expérientielle, on parlera plus volontiers de phygital learning ou d’apprentissage phygital, dans le sens où cette alchimie entre réel et virtuel ne sert pas qu’une visée artistique ou d’amusement, mais est censée faciliter l’instruction.

C’est notamment le parti pris de Phygital Labs, une entreprise ayant collaboré avec les développeurs de Minecraft pour proposer une nouvelle façon d’enseigner. Le professeur peut, en effet, utiliser comme support de ses cours l’environnement protéiforme et modulable à souhait de ce jeu de construction, ce dans le but d’immerger ses élèves dans un univers représentatif du contenu de leurs leçons. En recréant des scènes historiques, des lieux aujourd’hui disparus ou en modélisant l’invisible à l’œil nu comme un brin d’ADN ou des principes mathématiques abstraits, le monde virtuel devient, paradoxalement, un terrain d’apprentissage particulièrement concret pour les apprenants.

En plus de permettre l’acquisition de connaissances théoriques de façon ludique, les outils d’apprentissage phygitaux ont également pour objectif l’amélioration des soft skills telles que l’intelligence sociale et émotionnelle. Dans le cas de la licence Minecraft, les participants sont par exemple invités à créer des communautés, s’organiser en réseaux pour se répartir des tâches et des ressources ou réguler leurs émotions faces à des situations problèmes. Un module norvégien peut également servir à développer l’empathie en permettant à l’utilisateur de se mettre à la place d’une personne réfugiée en retraçant son itinéraire migratoire.

A noter que l’enseignant ne se voit pas remplacé par son outil dans le contexte du jeu phygital. Il s’agit simplement d’une alternance entre des séquences de formation présentielles classiques et des activités pédagogiques adoptant le format digital telles que des quizz, des jeux de mise en situation, l’utilisation de la réalité augmentée, etc. Le jeu intelligent ne saurait donc remplacer le corps professoral, mais plutôt apporter un outil complémentaire à sa pratique.

Critères du phygital learning

Le « processus des 8 C », tel que défini dans l’article « Phygital Learning Concept : From Big to Smart Data »  évoque les notions fondamentales de ce type d’apprentissage, que sont : 

  • La connexion : le fait de lier l’apprenant à un univers d’apprentissage virtuel via un outil numérique (par exemple, en activant un QR-Code sur son lieu de travail depuis son téléphone portable).
  • La captivation : capter l’attention du stagiaire en gamifiant l’univers de formation, ce en enclenchant des leviers favorisant la motivation (tel qu’un système de récompenses, de badges, de montée en niveaux, etc.)
  • Le contexte : stimuler l’apprentissage en utilisant des objets tangibles présents en salle de formation (c’est l’aspect « physique » du jeu phygital).
  • Le contenu : visuels agréables, contenus audios, références multimédia, etc. Multiplier les sources d’apprentissage permet de conserver une forme d’interactivité stimulante tout au long la formation.
  • La collaboration : encourager les participants à s’entraider pour réussir, et donc à devenir des acteurs de leurs parcours d’apprentissages respectifs.
  • La communication : les apprenants partagent leurs connaissances et leurs expériences entre eux de façon à s’enrichir collectivement, dans le cadre d’une véritable dynamique de groupe.
  • La cohérence : autrement dit la recherche d’une harmonie parfaite entre l’aspect digital et le présentiel de la formation.
  • La compétence : le résultat de ce processus avec des connaissance plus profondes et de meilleures compétences.

Avantages de l’apprentissage phygital

Recourir à des objets phygitaux permet donc des sessions d’apprentissage à la fois efficaces et engageantes. Mais pour certains publics peu habitués à mobiliser des outils digitaux dans un contexte professionnel, l’enjeu peut être double. En effet, si ces dispositifs offrent la possibilité d’acquérir des connaissances et des compétences valorisées dans un métier défini, ils permettent également de se familiariser à différents outils numériques. De même, en proposant une expérience de formation unique et décentrée du quotidien du stagiaire, son contenu s’assure de demeurer mémorable en son esprit. L’originalité de ces univers phygitaux permet alors de pallier la courbe naturelle de l’oubli telle que définie par le philosophe allemand Ebbinghaus.

Dans cet ordre d’idée, le smart game BEST FACTORY© développé par SYKO studio permet notamment de se former à la communication et à la coopération en entreprise dans un contexte inédit. Immergé dans le New York bouillonnant des années 20, le joueur est invité à intégrer une fabrique de chapeaux et incarner les différents rôles inclus dans une chaîne de production : achats, production, contrôle qualité, commercial, etc. Si la formation prend place dans un espace physique et que la découpe, la confection et la livraison des chapeaux a également lieu de façon concrète, le participant est, en amont, invité à découvrir l’univers du jeu au moyen de différents outils numériques. Que ce soit au travers d’un trailer de présentation offrant une plongée convaincante dans l’ambiance des « roaring twenties » ou durant la lecture de la bande-dessinée interactive en trois chapitres présentant ce contexte à travers la perspective de Chet, un jeune ouvrier de l’usine ; le stagiaire se détache peu à peu de son environnement professionnel pour pénétrer un espace propice à l’acquisition naturelle et spontanée de compétences.
En participant au storytelling, le phygital permet donc à notre produit de formation d’une part d’accroître son potentiel d’engagement, de motivation et d’immersion. Et d’autre part facilite et encourage le décentrage des participants.

Best Factory est un jeu de formation au management d’une chaîne de production jusqu’à la vente. Fonctionne avec des objets réels, des cartes d’animation et un ou plusieurs animateurs. EN SAVOIR PLUS

Pour conclure, en associant l’univers de l’animation présentielle et du numérique lors d’une session de formation, nous nous assurons de renforcer l’acquisition de connaissances et de compétences en proposant une expérience mémorable tout en permettant également d’élargir les possibilités de mise en application de ces savoirs perçus. De même, la dynamique de groupe et le support du formateur nous permettent de renforcer la motivation et l’engagement des apprenants afin de leur offrir la meilleure expérience de formation possible.

Bibliographie

  • Vate-U-Lan, P., Quigley, D., & Masouras, P. (2016). Phygital Learning Concept: From Big to Smart Data. In Thirteenth International Conference on eLearning for Knowledge-Based Society, Bangkok, Thailand.

Ressources